LTBL
: Et Mark, comment a-t-il intégré le groupe ?
George Young : Ils n’avaient plus de bassiste. Alors, je suis allé
à Melbourne pour les dépanner, puis, je suis revenu à Sydney.
Eux sont restés à Melbourne et peu de temps après ils ont
rencontré Mark. Je crois que ce dernier a eu le « job » parce
qu’il faisait la bonne taille (rires).
LTBL : Les autres pouvaient le regarder sans attraper de torticolis
?
George Young : c’est tout à fait ça ! (rires)
LTBL : A quoi doit-on son départ ?
George Young : Il avait une nana. « L’amour » (dit en français
!). Aujourd’hui, il doit sûrement le regretter : la fille est partie
depuis longtemps, tandis qu’AC/DC est encore là ! (rires) Mark
est rentré en Australie avec sa copine . Alors AC/DC a organisé
une audition et Cliff a été choisi car il était le meilleur
de tous ceux qui s’étaient présentés. Cliff est un
très bon bassiste.
LTBL : Peux-tu nous expliquer pourquoi « Dirty Deeds »
n’est pas sorti aux Etats-Unis en 1976 ?
George Young : Les Américains trouvaient les paroles trop grossières.
« Ce n’est pas bon, les gars », disaient-ils, et nous leur
avons répondu d’aller se faire voir. En 1981, le groupe était
au sommet, alors ils sont revenus en nous disant : « Salut les gars, y’a
de belles ballades sur l’album ! ». C’était du business
pur et simple, du commercial. D’un seul coup l’album les intéressait.
LTBL : Qu’est-ce que tu penses du boulot effectué par
Mutt Lange et Bruce Fairbain avec AC/DC ?
George Young : Sincèrement, je trouve ça très bon. C’est
le top. Tous deux sont très professionnels. Leurs productions sonnent
parfaitement. Pour ma part, je préfère les sons plus « crus
», moins travaillés. C’est pour cela que « Back In
Black » est l’album que j’aime le plus au niveau de la production
: le son n’est ni trop propre, ni trop cru… Pour moi, c’est
le juste milieu.
LTBL : Et quels sont tes titres préférés parmi
ceux que tu as produits ?
George Young : Il y en a beaucoup : « High Voltage », « Let
There Be Rock », « Riff Raff », « TNT », «
Long Way To The Top » avec la cornemuse… Bon était un très
bon musicien, un batteur très doué, mais il n’était
pas manchot non plus à la cornemuse…
LTBL : Est-ce vraiment lui qui joue sur « It’s A Long Way…
» ?
George Young : Oui, oui, tout à fait. Il l’a même fais une
fois sur scène, mais on n’arrivait pas à l’entendre.
C’était dans un grand club. On avait fixé un micro sur la
cornemuse… (rires) Mais quand on a enregistré cette chanson en
studio, il fallait absolument une cornemuse pour préserver l’atmosphère
si particulière du morceau. Une guitare n’aurait pas collé
aussi bien. Pourtant, tout le monde savait que techniquement ça serait
difficile à réaliser sur scène.
LTBL : Une autre chanson enregistrée pour le fun, « Fling
Thing »…
George Young : Elle a été enregistrée à Sydney…
avant l’enregistrement de « Dirty deeds », si j’ai bonne
mémoire. Vous savez, Bon Angus et Malcolm sont Ecossais. Je suis Ecossais.
Aussi, « Fling Thing » est une sorte d’Amazing Grace jouée
en studio pour le fun.
LTBL : Pourquoi as-tu délibérément omis «
Fling Thing » lorsque tu as produit « If You Want Blood »
? (NDLR : le premier live d’AC/DC a, en effet, été enregistré
à Glasgow en avril 1978 ; or le groupe avait
joué « Fling Thing » ce soir-là !)
George Young : Nous voulions que l’album soit Rock, le plus Rock possible…
et « Fling Thing » était donc superflue. Elle cassait le
rythme.
LTBL : Penses-tu pouvoir de nouveau produire AC/DC avec Harry dans
le futur ?
George Young : Non… (rires) Je suis trop vieux ! (Rires) Et puis, je suis
bien trop occupé !
[…]
LTBL : En 1988, as-tu vu Stevie jouer avec les Boys lorsqu’il
a remplacé Malcolm sur la tournée américaine ?
George Young : J’ai vu Stevie répéter avec AC/DC à
Boston en 1988. Angus m’avait téléphoné : «
Viens vite à Boston voir Stevie. Il a le son, il a le look ! »
Dès mon arrivée là-bas, je me suis rendu à la première
répétition et Angus m’a déclaré : «
Il n’y a rien à redire » Et il est vrai que Stevie sonnait
très bien et avait la bonne dégaine. Attention, ce n’est
pas Malcolm mais on sent qu’il a beaucoup écouté Malcolm
et qu’il connaît son style. Ce n’est pas Malcolm, c’est
le son Malcolm… Quoiqu’il en soit c’est un Young !
LTBL : Comment expliques-tu le départ surprise de Malcolm sur
cette tournée 1988 ?
George Young : C’était en partie dû à un problème
d’alcool. Mais ce n’était pas la seule raison. Malcolm était
très fatigué et il avait de gros problèmes familiaux. Tout
le monde s’accordait à penser que personne ne pourrait le remplacer…
Malcolm et Angus ont des styles très différents. Celui de Mal’
est très cru, très incisif. Il lui est même arrivé,
lors de certains concerts, de jouer « lead » quand Angus cassait
ses cordes… (pause)… Angus et Malcolm jouaient leur meilleure musique
lors des repas de famille : du rock’n’roll, un peu de piano, de
la batterie…
LTBL : Sais-tu pourquoi les deux frères se contentent souvent
de proposer des titres archi-connus en face B de leurs maxis, plutôt que
de régaler les fans de quelques inédits ?
George Young (démagogue) : Si ces chansons inédites n’apparaissent
pas sur disque, c’est qu’Angus et Malcolm n’en sont pas pleinement
satisfaits. Ils veulent être contents de tout ce qu’ils entreprennent.
Ils mourraient plutôt que de sortir n’importe quoi. Ils se fichent
si leurs albums ne se vendent pas, du moment qu’ils en sont fiers. Voilà
leur façon de penser. La chose la plus importante à leurs yeux,
ce sont les gens comme vous, les fans, ceux qui aiment leur musique… Les
maisons de disques, pouah ! La télé, pouah ! La presse, pouah
!…
[…]
LTBL : Connaissais-tu Chris Slade avant qu’il rejoigne AC/DC
? Et que penses-tu de lui ?
George Young : Je l’avais peut-être déjà rencontré,
mais je ne m’en souviens pas. J’aime bien Chris, c’est un
bon batteur. Il a une excellente mémoire et son jeu est très solide.
LTBL : Qui considères-tu comme le batteur convenant le mieux
à AC/DC ? Phil ?
George Young (hésitant) : Possible… Probablement parce que le mot
d’ordre d’AC/DC, c’est la puissance à l’état
brut. Et Phil sonne « cru ». Il est moins technique que Chris, mais
le plus important pour un batteur, c’est le feeling et la mémoire.
Il doit mémoriser toutes les structures et tenir la cadence des tournées.
Cela nécessite une très bonne condition car on doit pouvoir compter
sur lui tous les soirs.
LTBL : Quel est ton sentiment sur « Flick Of The Switch »,
album auto-produit par Angus et Malcolm ?
George Young : J’en suis fier ! Se produire est des plus compliqués
qui soit. C’est très très dur car tu n’as pas le même
recul que lorsque tu produis un groupe qui n’est pas le tien. De plus
les Boys étaient encore très jeunes à l’époque.
LTBL
: Harry et toi, vous vous êtes crédités sous des pseudonymes
sur la pochette intérieure de ce LP. Avez-vous aidé le groupe
?
George Young : Oui, à de nombreuses reprises, nous sommes allés
les rejoindre en studio à New York et nous leur avons prodigué
quelques conseils. Mais attention, il n’empêche qu’ils se
sont produits eux-mêmes.
LTBL : Quelques années plus tard, Harry et toi êtes revenus
à la production pour « Who Made Who ». Peux-tu nous en parler
?
George Young : Oui, l’album a été enregistré aux
Bahamas et mixé à New York. On s’est bien amusé.
Par contre, le film était un vrai navet ! Nul ! C’est dommage car
Stephen King adore AC/DC et, lorsqu’il leur a demandé de faire
la B.O. de « Maximum Overdrive », les Boys ont répondus oui.
Mais ils n’avaient pas encore vu le film ! S’ils l’avaient
vu, il est probable qu’ils auraient refusé : « Non, désolé
Stephen ! »
[…]
LTBL : Enfin, dernière question : as-tu une explication à
nous donner sur le départ pour le moins inattendu de Simon Wright ?
George Young : Non, pas vraiment. Je crois que Simon était très
désireux de s’installer aux Etats-Unis, du côté de
Los Angeles pour participer à des sessions d’enregistrement et
ne plus tourner. Simon est un gars très discret, trop peut-être.
« Comment vas-tu Simon ? » « ça va » (dit avec
une toute petite voix)… « Qu’as-tu fait hier Simon ? »
« Rien »… Il était trop introverti.
FIN
Un grand merci à Jul' pour avoir tappé l'interview :-)