Georges Amann, photographe (Juillet 2010), pour H2ACDC.com
Tout le plaisir est pour moi.
J’adore la musique depuis que je suis en culottes courtes. J’écoutais tous les groupes anglais, le british blues boom, Clapton, Hendrix, les groupes de San Fransisco. J’ai pris tout cela en plein gueule. Et j’étais, déjà, attiré par la photo. Et ce n’est pas un poisson d’avril, c’est à ce fameux concert de Led Zeppelin, à Saint-Ouen, le 1er avril 1973 (Palais des Sports de l'Ile des Vannes (St Ouen), ça été le flash. Je me suis dit, j’adore la musique, j’adore le rock et la photo, pourquoi pas lier tout cela ?
J’ai débuté comme assistant photographe, j’ai aussi bossé dans le milieu du théâtre, on est pas loin du rock avec tout ce qu’il comporte, justement, de théâtralité, et petit à petit j’ai fait mon trou. J’étais un assidu des concerts au Pavillon de Paris, dans la foule à l’époque, je n’avais pas de pass, mais au moins je pouvais faire tout le concert, et puis le Palace, Rock en stock, et pas mal de piges à Libé.
Ah oui, à Hard Rock magazine, on était 3 ou 4 à l’époque, pour le premier numéro. James Petit, Jean-Pierre Sabouret, Jean-Do Bernard et moi. Des années après, cela fait plaisir de savoir que tant de gens prenaient du plaisir à nous lire chaque mois. C’était pareil pour moi, quand jeune, je découvrais Rock’n Folk en kiosque, avec Jean-Pierre Leloir, Jean-Marie Perrier. Pas d’Internet à l’époque, les infos, c’était dans les magazines.
Sur le tard. Aux Monsters of rock, en 1991, à Copenhague. On avait sorti un spécial AC/DC avec Jean-Pierre Sabouret. De tous les gens que j’ai rencontré, et dieu sait que j’en ai rencontré, Angus c’est vraiment le gars le plus simple, le plus cool de la terre. Un mec immense par le talent. A ces fameux Monsters of rock donc, après avoir shooté AC/DC durant les 3 premiers morceaux, je suis retourné voir le concert, et surprise, Ellen, l’épouse d’Angus, est venue s’asseoir à côté de moi. Nous avons passé tout le concert ensemble, et de la voir ainsi fière de son diablotin sur scène, c’était quelque chose, un super souvenir.
Ce jour là, le 9 décembre 1979, AC/DC tournait ce qui allait devenir « Let there be rock, the movie ». Il n’y avait donc aucun photographe attitré, pas de pass photo pour la fosse. On était soit dans la foule, soit au niveau des gradins. Avec le télé-objectif. Je n’ai photographié que le premier show, celui de l’après-midi. Avec Bon Scott. Respect total pour Brian, mais Bon il avait un truc en plus, c’est un grand, comme Robert Plant. Un mec irremplaçable.
Oui, et aussi un des groupes les plus difficiles à photographier. Capter Angus, c’est un challenge, un vrai. Il y a du tri à faire (rires), avec pas mal de photos floues. Mais celles qui sont réussies, elles transpirent la sueur, le mouvement. J’ai eu la chance de les photographier de nouveau à Bercy, en 91, et un peu plus tard à l’Hippodrome de Vincennes.
Oui, et ça, crois moi, c’est toute une histoire. Un incendie a ravagé mon domicile en 1997. Heureusement, la grande partie de mes archives se trouvait à Paris. Et en particulier un rouleau de 36 poses du concert de 79 à Paris. Arnaud Durieux m’a appelé et m’a informé que l’une de mes photos plaisait beaucoup au groupe. Elle était parue d’ailleurs dans le spécial AC/DC dont j’ai déjà parlé. Il fallait que je prouve que ce cliché était bien de moi, alors j’ai carrément envoyé la planche contact. Ironie du sort, cette photo avait été léchée par les flammes, et en portait encore des traces. Quand le groupe m’a fait savoir que le coffret allait s’appeler « Bonfire », j’y ai vu un sacré clin d’œil… Mais je n’étais pas le seul sur les rangs, nous étions cinq en lice dans le monde. Le groupe voulait Angus sur les épaules de Bon. Tu as vu le film, la scène ne dure pas longtemps, je n’ai réalisé que deux photos à l’époque d’ailleurs. Et ma photo a été choisie, parce que le groupe a jugé que c’est là que Bon était le plus expressif.
C’est un compliment qui me va droit au cœur. Et pourtant, ce n’est pas le groupe que j’ai le plus photographié. Dans mon expo à venir, j’ai tenu à ce qu'y figure celle d’Angus perché sur les épaules du roadie. En 60 par 80. Et c’est vrai qu’il se dégage un truc…
Mon album préféré d’AC/DC, c’est un album qui s’appelle « l’intégral ». Je suis en train de faire mon choix des morceaux pour l’expo, et je pioche dans tous les disques du groupe.
Question judicieuse ! (rires). C’était ma grande envie. Malgré les coups durs, une courte baisse de régime, c’est aujourd’hui le plus grand groupe de rock du monde en activité. Et de loin. Voir 80.000 fans avec le smile, sans baston, tous à chanter, et bien, il y en a beaucoup qui devraient en prendre de la graine. Et puis ce sont des gars humbles, ils n’ont pas le melon, alors qu’ils pourraient vraiment l’avoir. Respect.
Ah, difficile de ne pas évoquer Motörhead. Une complicité longue de dix ans. De toute façon, il y a 3 groupes qui me donnent la patate, systématiquement. Led Zep, Motörhead et AC/DC. Les séances photos avec la bande à Lemmy, c’était toujours fun et très rock’n roll ! Aerosmith aussi, Perry et Tyler, deux grands bonhommes. Et puis Led Zep, évidemment. Nous ne sommes pas nombreux en France à avoir eu la chance de les photographier. C’était grand. Deux heures de concerts, deux heures de folie, avec à un billet payé à l’époque 30 francs (rires). Je veux saluer aussi Alice Cooper, qui depuis toujours laisse les photographes travailler pendant tout son concert, et pas seulement sur les trois premiers morceaux. Résultat aujourd’hui, avec cette contrainte, tout le monde réalise les mêmes clichés ou presque. A l’époque, pas de numérique non plus. Il y avait cette adrénaline, et cette part de mystère quand on développait. Cela nous faisait passer des week-end horribles, on se demandait si on avait réussi la session photos…
L’émotion d’abord. C’est un tout. Le rock est immortel, c’est l’histoire aussi. Regarde aujourd’hui, on est en plein vintage, pas de nouveaux groupes qui se profilent à l’horizon. Et c’est un peu dommage. Il n’y a pas vraiment de groupes qui me boostent autant que ceux que j’ai cité…
Ah non jamais. Pour l’expo, on veillera à ce que les tirages soient nickels, c’est tout. Mais, non, c’est du live, du brut, de la sueur et du mouvement.
Oh oui ! Un jour de 1988, me voilà parti à Minneapolis pour couvrir un concert de Kiss. L’après-midi, la maison de disque propose à ceux que cela intéresse d’aller visiter les fameux studios de Prince à Paisley Park. On visite donc, on assiste aux répétitions des musiciens présents et soudain, forcément, qui débarque ? Prince. Avec deux superbes femmes à son bras d’ailleurs. Et no picture. T’as les boules. T’es heureux d’être là, de vivre le truc, mais bon, les boules quand même.
Ah, déjà de la patience. Et puis aimer, vivre la musique. J’ai croisé des photographes que je ne nommerai pas qui faisaient cela comme ça…quoi. Moi, j’étais un passionné. A chaque fois que je le pouvais, je choisissais mes groupes, et plus j’aimais le groupe, plus je sentais ce qui se passait, ce qui se dégageait, et plus mes photos étaient réussies, en rendant l’énergie dégagée. Il est fortement conseillé aussi de parler anglais…
Et relever le challenge, celui qui se joue au milieu de plusieurs photographes, sortir LE cliché, et convaincre le lecteur que tu es le seul à l’avoir capté. Cela me rappelle David Lee Roth à Donington, il fallait être là, donner le meilleur de soi. Et supporter les mottes de terre, les bouteilles remplies d’urine. On entend souvent « Vous êtes bien dans votre fosse ». Oui, si on veut, parce que l’on se prend tout dans la gueule… (rires).
C’est vrai, j’habite dans un petit village de 4500 habitants, où j’ai retrouvé des fans de rock de tout poil, de 15 à 60 balais. Et puis il y a plein de musiciens, j’y ai longtemps croisé l’ancien bassiste de Trust. J’en ai profité aussi pour scanner mes photos rock, cela m’a pris un an, j’en ai près de 20.000... Et j’en ai sélectionné une quarantaine pour mon expo.
Et bien, c’est grâce à Facebook. J’ai mis en ligne un certain nombre de portfolio et cette galerie a flashé sur mes photos. Le patron du Pictorium est venu me rendre visite et il est reparti les yeux en kaléidoscope (rires). Nous avons convenu de travailler ensemble, et la galerie va me servir de producteur en somme. L’expo va tourner, en France et à l’étranger, et je prépare un coffret d’art pour l’expo de 12 clichés de guitaristes de légende des seventies. Ils y seront presque tous, à part Hendrix, que je n’ai pas eu la chance de photographier… Hendrix fait partie avec Janis Joplin et les Doors des héros des seventies partis trop tôt que je n’ai pas eu la chance de croiser. Pour revenir à l’expo, et c’est un grande satisfaction pour moi, le partenariat avec OUÏ FM s’est fait très naturellement.
1973- 1992, de Led Zeppelin à Nirvana, avec Kurt Cobain. Mon dernier concert comme photographe.
Hé bien, j'espère que quand ils auront bientôt 60 ans comme moi... ils écouteront toujours AC/DC.
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