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METAL ATTACK Octobre 1984

Non, AC/DC n'étaient pas à Paris pour monter une nouvelle fois en haut de la Tour Eiffel, ni pour goûter notre vin si réputé (ils préfèrent la bière de toutes les façons). Non, la vie de rock-star n'est pas des plus faciles et ne consiste pas seulement à faire des tournées, elle n'est pas toujours une partie de plaisir ! Or, cette fois-ci, c'était plus qu'une partie de plaisir pour ces messieurs que de se retrouver en notre charmante compagnie. Quant à nous deux, nous frôlions le septième ciel jusqu'à ce que notre magnétisme nous ayant abandonnées, Malcolm et Brian décidèrent sans appréhension aucune que notre maquillage valait bien quelques retouches. Quoi de mieux qu'une délicieuse tarte maison ! ….

Metal Attack - L'Europe est sans l'ombre d'un doute l'endroit rêvé pour AC/DC ?
Malcolm Young - surtout en cette période de l'année ; ça change. Ca fait du bien de pouvoir faire quelques concerts ici en été. D'habitude il fait froid, il fait triste et c'est dommage parce que c'est notre home, plus que l'Australie.

MA - Comment expliques-tu les quelques réserves émises par de nombreux fans d'AC/DC au sujet de « Flick Of The Switch » ?

MY - Je ne sais vraiment pas. Cet album est ce que le groupe voulait faire à ce moment. Oh oui, nous aurions très bien pu faire un album plus commercial, un peu dans la lignée de ce que font tous les grands noms actuellement et peut-être que le public aurait raccroché mais non, cela n'aurait pas sonné vrai. En tout cas, les admirateurs incontestés du groupe ont apprécié l'album, peut-être pas au même titre que nous, mais presque.

« Flick Of The Switch » est un album de hard rock dans tous les sens du terme et pour cela bien évidemment, il ne se prête pas vraiment à la conception des radios.

Nous n'avons jamais pensé devenir un groupe au succès démesuré. Nous avons beaucoup de succès, tant mieux, mais nous faisons en sorte qu'il n'agisse pas sur nous, qu'il n'influence pas le groupe.


M.A - Y a-t-il pour toi une différence entre le public européen et le public américain ?
Brian Johnson - A la base, tous les publics sont les mêmes. La différence entre les deux réside, je crois, dans le fait que les américains ont tout de même plus d'argent. Un concert ne représente donc pas autant pour un kid américain que pour un kid européen. Nous nous sentons dans l'obligation d'en donner encore plus lors des tournées européennes car nous savons qu'il y en a qui triment afin de s'acheter une place. Les américains boivent relativement beaucoup avant les concerts ; ça c'est une autre différence.

M.A - Oui, mais il faut avoir au moins 19 ans pour boire aux States, même 21 dans certains états
B.J. - Oh, arrête ! Ils trouveront toujours des moyens pour boire. Ils ne sont pas idiots, ils ont de bonnes combines. Tiens, j'ai quand même remarqué autre chose, c'est fou ce qu'il peut y avoir comme embouteillage lors d'un concert aux U.S.A.

M.A - Beaucoup plus de nanas également dans les concerts de rock ….
B.J. - Oui mais alors là, les américaines, je préfère ne pas en parler. Les européennes sont bien mieux. Après un show, elles viennent voir le groupe, on prend un pot, on discute et c'est tout. C'est bien plus sympa. Les américaines, pffft … On se demande parfois ce qui leur passe par la tête.

M.A - Que ferais-tu si tu étais le maître du monde ?
B.J. - Oooh, c'est bizarre comme question …. Mmmmmh je crois que je serais à la tête de toutes les brasseries du monde. J'irais toutes les visiter pour voir que tout se passe bien et vérifier la bonne qualité de la bière.

M.A - Quel effet cela vous fait-il d'être tête d'affiche à Donington surtout que Van Halen joue avant vous ?
B.J. - Tête d'affiche ou pas, on s'en fiche. Nous ne nous arrêtons jamais à de telles futilités. Nous montons sur scène et donnons le meilleur de nous mêmes. Nous ne pensons pas du tout à l'ordre de passage des groupes. Dans le rock, il ne faut pas penser à ça.

M.Y. - Cela dit, nous avions déjà participé à ce festival il y a quatre ans.

M.A - La popularité du groupe s'étant forgée à l'époque de Bon Scott, ne crois-tu pas que votre public exerce à présent une certaine pression sur le groupe en souvenir de Bon ?
M.Y. - Il est vrai que dans son histoire AC/DC a eu des moments difficiles, voire dramatiques. Après le « départ » de Bon, beaucoup ont pensé qu'il valait mieux, pour la sauvegarde de la légende, prendre sa retraite, même nous. Mais que pouvions-nous faire d'autre ? Il fallait continuer. Bon a sué dur pour AC/DC, cela aurait été injuste de tout laisser s'écrouler comme un château de cartes ; d'autre part Brian s'avère un excellent homme de scène comme un excellent chanteur. Quand je repense à Bon, on pourrait pu écrire des bouquins et des bouquins sur ce type … Je me souviens qu'on l'appelait souvent « Bonlikable » parce qu'il faisait rire tout le monde, mettait tout avec tout le monde, qu'il s'agisse de personnes âgées, de grand-mères promenant leur petite fille dans la rue ou d'hommes d'affaires dans quelque grande ville que ce soit. Il avait ce magnétisme, cette chaleur humaine … Avec beaucoup de plaisir et beaucoup de peine, il poursuivit : il adorait mon petit frère, il le considérait un peu comme tel d'ailleurs.

M.A - Vous enregistrez en ce moment ; pensez-vous réaliser un live sous peu ?
M.Y. - On aimerait bien mais ce serait injuste vis à vis de Bon parce que Brian aurait à chanter pas mal de chansons de Bon. On enregistre celui-là, ensuite peut-être que nous en ferons un.

M.A - « Back In Black » était-il un hommage à Bon ?
M.Y. - C'était bien plus que cela parce que la plupart des morceaux avaient été écrits du vivant de Bon. Nous avions bien sûr décidé de lui dédier un morceau « Back In Black » parce que le groupe revenait mais en deuil cette fois.

M.A - Considères-tu Bon toujours comme le père d'AC/DC ?
M.Y. - Oui, il le restera. C'était le personnage le plus sage que je n'aurais jamais rencontré. Son intuition était sans faille et sans lui au départ, AC/DC courait à sa perte ..

M.A - Comment as-tu ressenti la différence qu'il y a entre galérer dans des petits clubs avec Geordie et aller d'arène en arène avec AC/DC ?
B.J. - Ca montre que rien n'est impossible. J'espère que les gens qui liront ça se rendront compte qu'il ne faut jamais désespérer et qu'avec un minimum de talent, on peut arriver à beaucoup. De toutes les façons, je n'étais pas malheureux avec Geordie ; nous étions relativement connus et je m'éclatais bien.

Tandis que Malcolm en ajoutait un peu plus sur Bon Scott.

M.Y.- Il fait partie de ces gens qu'on oublie pas. J'aime parler de lui, je trouve fantastique qu'on ne l'ait pas oublié …« Dieu Jésus Marie. J'aurais jamais cru qu'on m'adorait autant, dit-il en imitant Bon. Il ne s'est jamais considéré comme un homme de talent et n'avait rien du faux modeste.

M.A - Que penses-tu de la scène rock en ce moment ?
M.Y. - Elle est un peu rance à mon goût. Elle se durcit en ce moment aux U.S.A. mais reste trop commerciale et cela nuit à l'image même du vrai rock'n'roll, c'est du pop-rock sophistiqué pour moi. Je préfère écouter des vieux trucs des sixties du style Little Richard, Jerry Lee Lewis ou même des œuvres classiques, parce qu'elles ne prennent pas et ne prendront jamais une ride. Je dois te paraître vieux-jeu mais je ne suis pas très au courant de ce qui se fait actuellement. J'écoute ce que j'ai envie d'écouter, ce que j'aime, sans me préoccuper du style que ce soit rock, punk, métal, classique … Si j'aime, tant mieux, si je n'aime pas, je passe.

M.A - Dis-moi Brian, comment expliques-tu que ton succès instantané ne t'ai pas donné la grosse tête ?
B.J. - Quand je vois des types qui deviennent relativement populaires et qui chopent la grosse tête, ça me fout en l'air.En plus, la plupart s'habillent ridiculement. Nous, nous n'avons pas besoin  de tout ça. La musique parle d'elle-même et cela suffit largement.

M.A - Y a-t-il une question que je ne t'ai pas posé et à laquelle tu aimerais répondre ?
B.J. - Ca, c'est le type de question que poserait un irlandais (NDLR : un Irlandais est pour un Anglais ce qu'un Belge est pour un Français …) Tiens, ça me rappelle .. Nous étions à Dublin (en Irlande) et après avoir sorti mes valises du taxi, le portier de l'hôtel m'a dit : « Suivez-moi, je suis derrière vous …. ».

Après quelques rires, j'aventurais la question suivante :

M.A - Y a-t-il une anecdote particulière d'une tournée que tu aimerais nous raconter ?
B.J. - Ooh, il s'en passe tellement, tu sais. En partant pour notre dernière tournée, nous nous apprêtions à décoller quand tout à coup, un des moteurs de l'avion a explosé. Je n'ai jamais eu aussi peur de ma vie. Une chose qui m'arrive aussi assez souvent, c'est de me prendre le pied dans le fil du micro et de m'étaler complètement sur la scène. Une fois même, je me suis pris les deux pieds à la fois, j'ai trébuché et je suis resté suspendu en l'air au-dessus des premiers rangs. Les kids avaient tous les mains levées au cas où je tomberais. Ils ont été fantastiques, merveilleux.

M.A - Un dernier petit mot pour les hard rockeuses en France ?
M.Y. - French female headbangers ?
Oh, on ne me l'a jamais posée celle-là. Et bien, if you want to bang your head, you may as well get you tits out (parce qu'il est plus agréable de voir des seins bouger que des têtes je crois).Nous pensons sérieusement que nombre d'entre-vous seront d'accord avec cette déclaration.

En attendant, la simplicité et le flegme dont ce groupe fait preuve ramène le rock à sa juste valeur et pour ceux qui n'auront pas eu la chance de les voir aux différents festivals cet été, dites-vous bien qu'AC/DC est loin d'en être à son dernier mot puisque le groupe entreprend une tournée gigantesque une fois leur prochain L.P. achevé. Si « Flick Of The Switch » n'a pas eu le succès escompté, souhaitons que le nouveau né parvienne à rejoindre les légendaires « Highway To Hell » et autres.

Les petites conversations du jour reprirent le dessus une fois l'entrevue achevée tandis qu'une superbe tarte aux pommes fourrée de crème pâtissière et saupoudrée avec excès de sucre glace attendait patiemment d'être dégustée lorsque finalement Malcolm et Brian prirent la sage décision de nous inviter dans un petit salon privé, loin des regards indiscrets.

Cette petite réunion intime ne dura que peu de temps pour s'achever dans le plus beau des ridicules. A malignes, malignes et demi, ils ont été plus rapides que nous et la délicieuse pâtisserie a vite fait de remplacer le fond de teint.

Une semaine plus tard, alors que je descendais paisiblement l'Avenue d'Onderrata, j'eus l'agréable surprise de rencontrer Brian et Malcolm sac de plage et serviette sur l'épaule qui flânaient ça et là, l'esprit dégagé, le visage reposé.

Ce soir-là, (samedi 8 août), AC/DC donnait un concert, l'unique concert préciserai-je, en Europe avant les dates de festivals, au Vélodrome d'Anoeta où plus de 7.500 personnes de chaque côté de la frontière vinrent les applaudir.

Qu'ai-je retenu de ce concert sinon qu'il fut mémorable aussi bien côté scène où le groupe exécuta outre ses plus grands classiques, y compris des morceaux de « Flick Of The Switch » (album bien mieux accueilli en Espagne qu'en France) une prestation scénique presque insoutenable de part l'énergie qu'elle révéla.

Foudroyé par un flot d'adrénaline en provenance de la scène, l'hystérie ne se fit pas attendre au sein du public. Il faisait chaud, il faisait lourd, le son n'était pas spécialement au point mais après plus de trois ans d'absence sur une scène espagnole, et à fortiori  basque, il est bon de les retrouver là où beaucoup pensent qu'il ne se passe rien et Brian d'ajouter : « je crois qu'on a fait plus fort que l'E.T.A. » (Organisation quelque peu violente qui fait parler d'elle assez souvent au Pays Basque …).


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