Comment
as-tu débarqué dans
le milieu de la musique ?
C’était un peu l’évolution logique d’un
adolescent ayant grandi dans l’environnement hyper-créatif
de la baie de San-Francisco dans les années 70. Tout s’est
déroulé très vite pour moi et ma carrière
fut assez courte. J’avais 17 ans lorsque j’ai photographié mon
premier concert en 1977, et j’ai raccroché en 1980. Cela
a en partie été dû à l’incident de Cincinnati
pendant le concert des Who* qui a marqué un tournant dans l’approche
de la sécurité lors des évènements musicaux.
C’est devenu problématique d’accéder à des
places stratégiques pour prendre des photos sans posséder
une carte de presse. A cette époque là, je vendais des
affiches de concert, des affiches de films musicaux à la sortie
de cinémas ou encore aux dépots de magasins d’instrument
de musique comme le Guitar Center en Californie. Au moment où j’ai
commencé à vouloir devenir journaliste de presse musicale,
les groupes ont commencé à imposer des restrictions sur
les photographies live : du genre, seules les trois premières
chansons pouvaient faire l’objet de photographies. Ca ne m’allait
pas du tout, car l’énergie dégagée en live
augmente au fur et à mesure que les chansons défilent et
c’est là que se font les meilleures photos. J’ai alors
décidé de changer de terrain de jeu. Je suis cependant
vraiment nostalgique de cette époque là et suis vraiment
heureux d’avoir gardé avec moi l’ensemble de mes pellicules. As-tu suivi une formation ? as-tu eu un « maître » en la matière ? J’ai pratiquement tout appris tout
seul. J’ai juste suivi
quelques cours de photographie au lycée (une chance que ceux-ci
aient été particulièrement instructifs). Ca a coïncidé avec
le moment où je commençais à prendre des photos
de concerts. A cette époque là, je photographies des groupes
mais également des événements de sport mécanique
(la principale raison pour laquelle je suis devenu photographe). Les
ressemblances et les différentes de ces deux terrains de jeu m’ont
aidé à m’améliorer. Les deux ont un côté viscéral.
Bruyant, spectaculaire, extrème… Cela demande beaucoup
de concentration pour faire un travail propre. |
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Quand
as-tu rencontré AC/DC pour la première
fois ?
Je ne les ai jamais rencontrés en fait. J’étais juste un fan qui essayait de devenir un photographe. tes photos d’AC/DC sont superbes, on s’est délectés sur votre site Internet « Merci » (en français dans le texte). C’est
très gentil. Je suis encore très étonné quand
je re-regarde mes photos de Bon. Il ressemble à un animal sauvage
et féroce. Et c’est un compliment. Les fans d’highwaytoacdc.com
peuvent les voir sur www. myhraphoto.com Est ce que photographier AC/DC a quelque chose de particulier ? En un sens, oui, ça l’est. Croyez moi qu’à l’époque où l’autofocus n’existait pas, garder Angus dans l’objectif était pas simple. Ca, plus être valdingué de droite à gauche par la foule, ça en devant presque impossible. Mais le challenge, c’est important. Qu’as-tu pensé la première fois que tu les as vus Live ? Wow.. Je me rappelle surtout de l’énergie incroyable. C’était presque primal. C’est facile pour moi de le décrire car je m’en souviens comme si c’était hier. C’était en Juillet 1978, pendant le Powerage Tour. Je les ai vus dans une petite salle, à San Jose. Imaginez : la première fois que je vois AC/DC, c’est dans une petite salle confinée, à peine la taille d’une grosse discothèque. Ils ouvraient pour Ronnie Montrose qui venait de réaliser un album instrumental en solo. On les connaissait déjà bien grâce à la radio locale qui les diffusait beaucoup et je possédais déjà tous leurs albums. Comme d’habitude, j’étais venu assez tôt pour pourvoir me choisir un bon angle de prise de vue. Les lumières se sont baissées et les bruits de la foule ont vite étaient recouverts par les rugissements des guitares que nous connaissions et adorions tous. Ce qui s’est passé après, je ne l’avais jamais vu, ni ne l’ai revu depuis. AU bout d’une chanson, des dizaines de filles se sont créé un passage pour atteindre les premiers rangs et essayer de monter sur scène. Elles étaient hypnotisées, ça ressemblait presque à une pulsion sexuelle. Elles essayaient de monter (la scène leur arrivait à la poitrine environ), se faisaient vider par la sécurité, mais recommençaient inlassablement. De notre côté, on suppliait l’équipe de les sortir de là pour de bon. Mais personne ne se comprenait avec tout le boucan et ça a duré pendant plusieurs chansons. Notre chance, c’est qu’un feutre noir cachait le dessous de la scène, et qu’une fois passé dessous.. il était impossible d’en ressortir.. Quels souvenirs gardes-tu de l’édition 78 du Day on the Green Festival ? Quelle était la réaction du public ? J’ai gardé les négatifs originaux. J’ai totalement
usé mes vieux T-shirt de concerts. Je suis sûr que vous
avez tous entendu votre femme vous dire d’enfin jeter ces vestiges
pourris de vieux concerts mais heureusement, on peut en retrouver sur
ebay. les as-tu pris en photos lors de l’édition de 1979 ? Non, mais je les ai vus quand ils sont retournés vers la Baie. Mais les voir avec mes copains plus en retrait dans la salle était moins intense. Quelles tournées d’AC/DC as-tu photographié? Je ne les ai jamais vraiment suivi en tournée, je les ai photographiés pendant le Powerage tour à San Jose et à Oakland à deux semaines d’intervalle. Ca ne doit pas être facile de profiter d’un show d’AC/DC tout en prenant des photos si ? On pourrait le croire, mais c’est comme cela que je préfère. Je rentre dans une véritable bulle et je me sens beaucoup plus connecté au groupe en les photographiant. Il faut anticiper les mouvements de lumière, les instants de complicité avec le public, c’est un peu comme devenir un membre du groupe à part entière. Je me suis toujours concentré pour attraper « le moment » clé. Cela m’a toujours fait apprécier encore plus les shows auxquels j’assistais. Comment réaliser une belle photo d’Angus ? Il est toujours en mouvement ! Je vous l’accorde, c’était pas facile. Il faut garder en tête que c’était les années 70 et non seulement j’étais limité en nombre de pellicules et en matériel à trimballer, mais surtout, l’autofocus n’existait pas encore ! J’étais totalement dépendant de l’éclairage de la scène. L’expérience acquise à shooter des dragsters et autres voitures de course m’a aidé. Vous devez partir d’un panoramique de la voiture pour pouvoir la garder dans l’objectif, pour ensuite le raccourcir. Bien qu’Angus ne se déplaçât pas à 320 km/h, il était assez rapide pour demander de bonnes techniques photographiques. Voici aussi un bon conseil pour prendre Angus en photo : munissez-vous de lingettes nettoyantes pour objectifs ! Se retrouver au premier rang d’un concert d’AC/DC avec un Angus en mouvement perpétuel, c’est comme si on vous essorait une serviette de bain mouillée sur la tête. Peut-on considérer Angus comme le guitariste le plus intéressant à prendre en photo ? D’un point de vu photographique, Angus est dans mon top 3, c’est certain. Angus, Keith Richards et Ritchie Blackmore. On est toujours à la rechercher d’une sorte d’expression très théâtrale lorsque l’on fait de la photo et Angus vous en donne plus qu’il n’en faut. A ton avis, qu’apportait AC/DC qui n’existait pas à cette époque ? Ils étaient comme un sot d’eau glacée qu’on vous envoyait à la figure. De ce dont je me souviens… on a commencé à sérieusement en entendre parler dès 1976. A cette époque, le rock semblait se prendre un peu trop au sérieux avec des groupes prestigieux comme Fleetwood Mac, Les Eagles ou Yes. Ca a commencé à devenir un peu aseptisé. Puis est arrivé AC/DC, pas de chichis, rafraîchissant et allant droit au but. C’était comme si Chuck Berry avait été reconstitué pour les années 70. Comment as-tu réagi à la mort de Bon ? J’étais perdu. Ils étaient au top et sa mort m’a paru vraiment idiote et tragique. C’était un si bon chanteur que je me suis dit que c’était la fin du groupe. Qu’as-tu pensé du choix de Brian à ce moment là ? Au début, j’étais dégoûté. Je me suis demandé comment ils avaient osé. Je crois que c’était la réaction d’un peu tous les gros fans à ce moment là. Mais quand Back in Black est sorti, tout s’est envolé. La mort de Bon avait semblait avoir galvanisé le groupe. La voix de Brian était aussi puissante et allait parfaitement avec le groupe. C’est encore aujourd’hui un de mes albums préférés, et pas seulement de leur catalogue mais de tout ce qui a été fait à cette époque là. Quels sont tes trois albums d’AC/DC préférés ? Highway to Hell – simplement pour Touch too Much qui est parmi
les 4 meilleures minutes de rock de l’histoire. AC/DC fait-il partie de ses groupes pour lesquels tu as eu une joie particulière à les voir atteindre les sommets ? A l’inverse, as-tu rencontré des groupes dont la réelle valeur t’a toujours parue sous-estimée ? Carrément. J’ai une sorte de fierté à les avoir vu très tôt et à avoir vu de plus en plus de personnes se rassemblait autour d’eux. En ce qui concerne, les groupes qui n’ont pas eu la reconnaissance méritée, je citerais le premier Lineup de Journey. Leurs trois premiers albums étaient incroyables. C’était avant que Steve Perry les rejoigne et les transforme en groupe de radio. Ils étaient de bons Rockers, sans na-na-na-naaa-na pour pourrir les chansons. Raconte-nous les meilleures séances de photos que tu as pu réaliser avec des légendes du Rock ? Je n’ai jamais vraiment été un vrai photographe
de Rock à proprement parler mais voici quelques unes de mes bonnes
expériences : T’es-tu déjà trouvé dans uns situation où tu aurais aimé avoir un appareil photo mais n’en avait pas ? Des dizaines de fois. Le nombre de concerts que j’ai photographie est minime par rapport au nombre de concerts auxquels j’ai assistés. Par exemple, les concerts pour les réveillons du jour de l’an étaient dédiés à la fête avec les copains dont je n’ai jamais pris un appareil photo avec moi pour ceux là. Parmi ces show là, je me mords les doigts de n’avoir pas pu prendre Lynyrd Skynyrd en photo. Une autre fois, ma voiture m’a planté en rentrant d’un concert d’Aerosmith que j’avais photographié. Des inconnus m’ont dépanné, mais mes photos et mon appareil ont été volés. Trois jours plus tard, j’assistais à un concert de Robin Tower que j’avais également prévu de photographier… si j’avais eu mon matériel.. Une autre fois, j’assistais au concert de charité A.R.M.S de Ronnie Lane en 1983 à San Francisco, et bien que j’avais arrêté de prendre des photos de concert, le fait de voir autant de tête d’affiche sur scène ( Clapton, Beck, Page) m’a fait regretté un moment de ne pas être au premier rang avec mon appareil photo. Tu as assisté aux « True Icons of the Eletric Guitar » Quels sont à ton avis les prochaines grosses pointures ? Il est très difficile de répondre à cette question. Le problème aujourd’hui est que le sartistes ont une pression monstre et doivent pondre rapidement des hits. Ils n’ont pas vraiment le temps d’expérimenter de nouvelles techniques ou d’explorer de nouveaux horizons. Je ne pense par exemple pas qu’AC/DC aurait pu faire aujourd’hui ce qu’ils ont fait dans les années 70. Et très honnêtement, j’accuse les radios et les maisons de disque. Trop de groupes se retrouvent lourdés par leurs maisons de disque au bout de deux ou trois albums. Ils n’ont même pas la possibilité de durer pour s’améliorer et devenir des légendes. Cekà dit, trois guitaristes me viennent à l’esprit : John Mayer, Dan Auerbach des Black Keys et Andrew Stockdale de Wolfmother. Joues-tu de la guitare ? ou es-tu musicien ? Dans les années 70, je jouais un peu. J’avais un Les Paul Sunburst couleur Cherry que je branchais sur un Fender Bassman et un « cabinet 4-12s ». J’avais racheté tout ça à mon Boss. Mais je ne les ai pas gardés longtemps. Je me sens vraiment touché par la musique mais ne suis pas un musicien. A chaque fois que je jouais, je regardais mon appareil photo en me disant que je devais me concentrer que sur un des deux. La photographie a gagné. Quel type de matériel utilises-tu ? Commençons par ce que j’utilisais au moment où je
photographiais AC/DC et toutes les photos rock consultables sur mon site.
J’ai utilisé le corps d’un Pentax MX avec un objectif
grand angle de 28mm et un zoom 70-210. Après me l’être
fait piqué, comme mentionné plus haut, j’ai changé pour
un Nikon avec la même configuration focale mais un élément
en plus : un Vivitar 400 téléphoto que j’ai utilisé uniquement
pour les photos en plein air lors du Day on the Green Festival. La première
fois que j’ai l’ai utilisé, c’était au
dernier concert de Led Zep aux USA, le 24 juillet 1977. En quoi le Noir & Blanc te correspond mieux ? Sur quels critères décides-tu d’utiliser ou la couleur ou le N&B ? J’ai tendance à choisir le N&B par défaut car
j’aime l’atmosphère qui s’en dégage.
Etrangement, je le trouve plus authentique que la couleur. Aujourd’hui,
lorsque j’utilise la couleur, c’est surtout pour intensifier
un certain ressenti. Par exemple, j’aime beaucoup l’utilisation
de la couleur que Jean Pierre Jeunet a. je bosse actuellement sur des
images de carnaval prises avec un vieux Kodak Brownie des années
50 que je scanne puis retouche sur Photoshop pour exagérer les
teintes. Y-a-til d’autres photographes de Rock dont tu admires le travail ? J’imagine qu’il doit y avoir Robert Ellis ou Fin Costello ? Sans aucun doute, j’adore leurs deux carrières. Et comme mentionné plus haut, je suis également admiratif du travail de Jim Marshall et de Neil Preston. Je pourrais également ajouter Mick Rock ou encore Jorgen Angel. Greg, nous offrirais-tu la publication d’une photo inédite d’AC/DC ? Si j’en avais, j’adorerais ! N’hésitez pas à me demander lesquelles vous choisiriez parmi celles sur mon site Web pour illustrer cet interview. Dites moi juste combien vous en voulez ! As-tu un message particulier pour www.highwaytoacdc.com et ses membres ? Je suis honoré de pouvoir témoigner sur ce si grand groupe
de l’histoire du Rock. AC/DC gardera toujours une place spéciale
dans mon coeur de fan, et de photographe. J’ai eu la chance de
les photographier en tant que fan, avant de devenir un vrai professionnel.
Je suis sûr qu’il y a des membres d’H2ACDC qui ont
vécu la même chose et savent ce que ca peut représenter. * (le 3 décembre 1979, 11 personnes trouvent la mort suite à mouvement de foule) Interviewé par Sydney76 en Juillet 2007 |