Revenons à ce concert de Munich : sur cette dernière tournée
d'été, vous avez invité de nombreux guests à ouvrir
pour vous. A Munich, il s'agissait de Buddy Guy. Ce dernier s'est fait huer
et s'est ramassé des cannettes. Il a d'ailleurs refusé d'assurer
la date suivante. Ne penses-tu pas que le public d'AC/DC est très exclusif
? Trop parfois ?
(Gêné) Buddy Guy est l'un de nos héros et est indéniablement
un grand bluesman. Il devait en effet assurer d'avantage de concerts en notre
compagnie mais, vu l'acceuil qui lui a été réservé
la première fois, il a préféré se retirer et s'est
vu remplacé par George Thorogood & The Destroyers en Finlande. Ce
dernier n'a lui aussi, pas eu la partie facile. Il faut dire qu'il fait énormément
d'américanismes (Brian se lance alors dans une hilarante imitation avec
un accent américain à couper au couteau : "I'm gettiiin'
in myyy caaaar with my babyyy !")/ Le problème, c'est qu'en Finlande,
tout le monde ne parle pas anglais et que, forcément, ses histoires de
whisky et de bagnoles ont eu plus de mal à passer. Sinon, dans un autre
registre, je dois avouer que j'ai été plutôt par Nikka Costa
qui ouvrait pour nous en Suisse, à Bâle (Ndlr : souvenez-vous,
Nikka Costa, la gamine qui avait décroché un hit avec "On
My Own" en 1981. La vilaine petite chenille s'est aujourd'hui transformée
en un magnifique papillon !)
Bôf, elle danse mieux qu'elle ne chante (rires) !
Hmm, c'est vrai qu'elle a un joli p'tit cul ! Non, sérieusement,
j'ai trouvé qu'elle assurait bien et je lui souhaite le meilleur pour
la suite.
Le nouveau DVD renferme dix minutes de séquences backstage où
l'on peut vous voir dans les loges vous préparer avant le show, assurer
le soundcheck, etc. Vos fans attendaient ça depuis des années.
Depuis la sortie du film Let There Be Rock (1980) pour être plus
précis.
Oui, nous avons dit aux caméramen de nous suivre sur l'ensemble de
la journée. Et vous savez comment ça se passe : au début,
tu n'es pas très naturel car tu sais que tu es filmé mais, au
bout d'un certain temps, tu ne fais plus gaffe, les caméras font partie
du décor. C'est là que ça devient intéressant. Car
on se marre bien dans les loges. Et puis, nous recevions des membres de la famille
ce jour-là : la fille de Malcolm était là, la femme d'Angus
également, Et puis, mon frangin Maurice. C'était notre chef cuistot.
Il a remporté le prix de "l'homme le plus apprécié
par l'équipe sur la tournée 2000/2001", the rookie of the
year. C'est un vrai nounours, mon frère. Il est très différent
de moi. Déja, c'est un mec gentil (rires). Au départ, il avait
été engagé pour s'occuper de la bouffe du groupe uniquement
mais, au fil des dates, les roadies l'ont supplié de cuisinier pour eux
aussi. Le pauvre ! Il pensait servir 10 repas par jour et voilà qu'on
lui demandait d'en faire 60 !
Vous jouez dans des stades de plus en plus énormes mais je me suis
laissé dire qu'en tout début de tournée (le 18 août
2000. très éxactement), vous avez donné un concert surprise
dans un hôtel devant un public restreint ?
Oui, c'est éxact. C'était à Atlanta, au Westin Peachtree
Plaza. Chaque année, notre label, Atlantic, se réunit là-bas
l'espace d'une semaine pour y tenir sa convention annuelle. Ils nous ont demandé
si nous étions prêts, à cette occasion, à jouer live
pour eux pendant une demi-heure. Francement, je pensais que Malcolm et Angus
allaient décliner l'invitation et j'ai été très
surpris d'apprendre qu'ils avaient accepté. Trois autres groupes, des
nouvelles signatures, jouaient également ce jour-là. Mais ils
se sont contentés de faire du playback. Nous, nous avons fait cinq ou
six titres live. A l'issue de ce mini-concert, Phil est venu me voir et m'a
dit : "Nom de Dieu, je n'avais pas réalisé qu'on était
si bons sur scène ! Ca m'a rappelé nos premiers gigs, en 1975/76".
Il est vrai que nous voir jouer dans un tel endroit était assez surprenant
: Malcolm et Angus évoluaient dans deux mètres carrés mais
nous avons mis le feu. J'ai pris un pied monstrueux.
Sincèrement, ça ne te manque pas cette ambiance de clubs,
ces prestations à taille plus humaine ?
Si, bien sûr. Je m'en suis encore rendu compte tout récement
en écumant les clubs avec mes potes de Geordie, à Newcastle et
dans les environs (Cf Rock Hard n°5). Je me suis bien marré et puis,
ce faisant, on a enfin pu payer de nouvelles dents à notre bateur Dave
Wittaker. Quand je suis arrivé à Newcastle et que j'ai vu, après
tant d'années, je me suis dit : "Tiens, il a quelque chose de changé".
Il n'avait pas assez de thunes pour se payer le dentiste. Je lui ai demandé
:
- " Combien te reste-t-il de dents ?"
- "Oh Brian, sois cool. Ne me parle pas de mes dents, c'est une catastrophe
!"
Histoire d'en avoir le coeur net, j'ai fait appel au bassiste, Dave Robson :
"Dave, je vais raconter une blague à Wittaker. Profite du moment
où il se marre pour compter ses dents ! ". Auusitôt dit, aussitôt
fait ! Résultat des courses, notre ami avait trois dents. Il y a quelques
jours, je l'ai croisé et il avait un râtelier tout neuf : "C'est
génial Brian, je peux de nouveau parler aux gonzesses !" m'a-t-il
dit, avant d'ajouter "le problème, c'est que maintenant, il me faut
aussi acheter une brosse à dent ! Ca fait des années que je n'ai
pas utilisé de dentifrice ! " (rires). C'est un mec en or. J'ai
passé de grands moments avec Geordie II. Nous avons joué précisément
la même set-list que celle que nous avions faite lors de mon dernier concert
avec le groupe, juste avant que je ne rejoigne AC/DC. Je me suis vraiment éclaté.
Il paraît qu'à cause des attentas terroristes du 11 septembre
dernier, le management d'AC/DC n'a pas vu d'un bon oeil ton départ des
States pour l'Angleterre ?
Effectivement, ils flippaient un peu. Moi aussi pour être tout à
fait franc. Mais une promesse est une promesse, tu ne peux pas ne pas assurer
tes engagements. Les mecs de Geordie m'attendaient et je ne pouvais plus reculer.
Et puis, je n'avais aucune envie que ces salauds de terroristes m'empêchent
de vivre ma vie. Ce sont de vrais méchants, des enculés et je
déteste voir les méchants l'emporter. J'aime les voir perdre à
la fin. Espérons qu'il va en être ainsi cette fois : en tout cas,
ils ne m'empêcherons pas d'agir comme je le souhaite et d'être moi-même.
Si on cède à la panique, on leur concède la victoire en
réagissant comme ils l'attendent. Et je ne voulais pas cèder.
Bon, c'est vrai que dans l'avions que j'ai pris pour Londres, il n'y avait pas
foule. On sentait l'anxiété dans l'air. Aucun femme à bord,
aucune hôtesse, rien que des hommes. Le pire, ce sont les couteaux et
les fourchettes en plastique qu'ils nous ont donnés au moment des repas.
Je n'ai pu m'empêcher de penser : "Doux Jésus, le monde ne
sera plus jamais comme avant". C'est effrayant quelque part.