| Highway To ACDC : le site francophone sur AC/DC

Interviews & Articles

AC/DC : AUTOPSIE D’UN SUCCES - 2 -

Et de l’image du groupe ...

L’image de tout artiste évoluant dans le show business musical repose avant toutes choses sur sa musique. On nous reprochera peut-être cette lapalissade, mais il nous semble utile de rappeler le principe tant l’époque actuelle semble avoir mis en avant le visuel avant le sonore. Comme si un look, une « gueule », pouvaient suffire à faire valoir la valeur de tel ou tel individu. Force est de constater qu’AC/DC a su mixer ces deux paramètres.

Musicalement d’abord. Une écoute d’une dizaine de secondes d’un morceau et la griffe AC/DC se révèle identifiable instantanément. Aussi, on se demandera comment une discographie de quelques vingt albums, basée, nous schématisons, sur les trois mêmes accords a-t-elle pu rencontrer un tel engouement auprès du public ? Et les exemples sont légions ! Hell ain’t a bad place to be - Up to my neck in you - Highway to Hell - If you want blood (you’ve got it) - Love hungry men – Shoot to Thrill – Badlam in Belgium – Fly on the wall – First blood etc…….. sont des morceaux dont le riff principal est constitué des trois accords suivants : La – Ré – Sol. A ceci, il convient d’ajouter d’autres morceaux reprenant le même schéma harmonique, mais dans une tonalité différente. Citons à titre d’exemple High voltage – Dog eat Dog – Back in Blac…

Bref, on le voit, une bonne partie de la discographie d’AC/DC peut être qualifiée de copie carbone permanente. Mais là où la subtilité des frères Young prend toute sa dimension, c’est par l’utilisation abusive mais intelligente de ce procédé. Nous avons parlé de «subtilité » car pour le néophyte en matière musicale, un Hell ain’t a bad place to be n’est en rien semblable à un Highway to Hell. Si les frères Young semblent posséder un bagage musical assez limité, leurs capacités à exploiter celui-ci sous toutes les coutures sont indéniables ! En somme, et pour simplifier, le but du jeu n’est pas de savoir dans quel ordre on va jouer tels ou tels accords, mais comment on va insuffler à l’ensemble une pulsion singularisant la chanson parmi celles bâties sur le même modèle.

C’est à ce niveau qu’entre en considération un paramètre considérable chez AC/DC : le groove. A ce titre, s’il est un membre indéniable dans l’élaboration du swing propre à AC/DC, c’est Phil Rudd. Trop souvent considéré comme l’un des plus mauvais batteurs de la famille du Rock, le métronome des Boyz a cette capacité unique à doter les compositions des frères Young d’une pulsion totalement inédite. Pour trivialiser la chose, nous dirons que sur le papier, ses coups de caisse claire se noteront sur chaque temps. Du moins en théorie, car dans la réalité effective, ces coups de caisse claire sont lègèrement décalés en regard de cette notation musicale. En somme, un swing n’existant que par le sonore, mais impossible à transcrire rationnellement. Pour se rendre compte de ce propos, nous renvoyons le lecteur à porter une écoute attentive aux morceaux Highway to Hell – Back in Black ou bien encore aux versions live de Rocker lorsque Angus se livre à sa balade traditionnelle dans le public. Ce qu’il convient surtout de souligner, c’est que la frappe de Phil Rudd se porte en écho des rythmes primaires interprétés par les tribus africaines. Ces tribus ont élaboré des structures rythmiques basiques, reposant essentiellement sur les battements du cœur humain. La relation est alors évidente et il serait loin d’être absurde de prétendre que lorsque nous écoutons un morceau d’AC/DC, notre inconscient effectue une translation avec une structure rythmique cardiaque que nous connaissons parfaitement, puisqu’elle est nôtre. Bien sûr, il serait déplacé d’affirmer que les Boyz aient eu pour volonté de proposer une musique axée sur une structure cardiaque, mais il nous semble que ce soit un paramètre loin d’être étranger à l’efficacité du swing propre à AC/DC.

Mais indépendamment de sa musique, le gang a su tirer profit de ce qui au premier abord semblait le desservir afin de donner une identité visuelle à son Rock. Pensez donc…. Un écolier dépravé, un marlou tatoué, eux-mêmes, suivis par trois lascars chevelus flirtant avec le mauvais genre. Il n’en fallait pas moins pour affoler les autorités bien pensantes australiennes et se voir considéré comme une nuisance éthique. Mais justement, AC/DC aura su jouer cette carte de l’illicite, puisque là où la morale interdisait aux kids de pénétrer en des domaines qualifiés de malsains, les Boyz inviteront ces mêmes kids à les rejoindre. En somme, profiter d’une interdiction étatique comme d’un fer de lance pour rassembler un maximum d’individus et se forger une réputation de mauvais garçons dans laquelle le fan pouvait se reconnaître. A ce titre, certaines paroles de Bon Scott sont sans appel ! Que l’on songe à Problem Child, à certains couplets de Rock&Roll singer ou bien encore à Bad Boy Boogie.
L’arrivée de Bon Scott en septembre 1974 renforcera davantage cette image de sales types et assoira avec encore plus de rigueur (oui, de « rigueur ») cette dimension de groupe indésirable. Mais surtout, l’intégration de Bon Scott se présentera comme le pendant d’Angus Young, comme un équilibre entre la virilité du type tatoué, abusant de boissons alcoolisées et la dégaine de l’adolescent, frêle, consommant des barres chocolatées et du lait ! Deux extrêmes, mais qui pourtant en viendront à donner une image sans précédent au Rock&Roll. Le verso de la pochette européenne de l’album High Voltage entretiendra d’ailleurs cette dualité en mettant en avant des lettres fictives adressées à chaque membre du groupe, Angus « le sale gosse » héritera d’une lettre du principal de son collège invitant ses parents à en faire un citoyen responsable qui cesserait de manger en classe, soignerait sa tenue vestimentaire et se montrerait docile. Bon s’inscrit quant à lui dans le rôle de l’adulte qui fait chavirer les cœurs puisqu’il est le seul membre à recevoir une missive passionnée et puérile d’une « lolita » amoureuse de ses tatouages et de son cœur d’or en dépit du père de cette dernière, symbole de rigueur et de maîtrise puisque maire de la ville... D’ailleurs, afin de profiter au maximum de l’apparence puérilité d’Angus, la maison de disques ne se privera pas de duper les fans pendant plusieurs années en tronquant sa date de naissance en le rajeunissant de quatre ans, et en invitant le public à venir découvrir le « bébé star à la guitare ». (3)

(3) Tel fût l’un des slogans sur certaines affiches des premiers concerts du groupe en Angleterre.

< - > - >>

Post-it
Mises à jour
Discussions