par iangillan » 27 Août 2015, 20:25
V. Sabbath Bloody Sabbath (1973) (17/20, Mention Très Très Bien)
Ca commence par une pochette, comment dire … hallucinée et hallucinante (16/20). Faut la voir. Bien sûr, c'est laid et de mauvais goût, mais bon dieu, qu'est-ce que c'est évocateur ! A mes yeux, elle fait partie de l'album, contrairement à la plupart des pochettes . Parce qu'elle annonce totalement le contenu : criard, écorché, cauchemardesque, laid et exaltant à la fois … Ce disque, et c'est affiché en couverture sous forme de dessin, c'est l'enfer musical --- sur terre. Le cauchemar absolu, mais pas sous une forme outrancière, fantasy, non, sous forme de maladie onirique, le mauvais trip d'une créature en chair et en os ; Black Sabbath, sur SBS, c'est la BO du déclin, violence et mélopée angoissante, la tempête sous un crâne désespéré et suant de fièvre, un rush cocaïné fiévreusement parano, un goût délicieux de homard légèrement périmé, un Romanée-Conti 1928 servi en gants blancs par Hermann Goering, Miss Monde défoncée qui vient de vomir dans l'évier, bref, c'est un délice décadent à la Huysmans … Chaque note de cet album est doucement affreuse, et oui, je ne sais plus quoi dire, et oui, on me pardonnera d'abuser de l'oxymore ;
Ce n'est pas un album-concept, mais ce disque, plus que tout autre dans la discographie du Sab, forme un tout. Je vais essayer de rester aussi froid (et mesquin, comme toujours ^^) que possible. Mais il faut écouter ce disque de A à Z, c'est clair, alors que tous les autres se laissent raccourcir, ou du moins compiler de façon plus ou moins aléatoire. Ca a un début, un milieu et une fin ...
Ce début, c'est la chanson éponyme (SBS, 18/20), et c'est rien de dire que c'est un foutu monument, même si on peut avoir du mal – on est loin de Paranoid et de Iron Man. C'est pas facile, facile, quand bien même on est face à une compo superbe, avec une grosse évolution et un Ozzy écorché vif . Magnifique, et inchantable pour Ozzy depuis 40 ans (il a essayé, certes … aujourd'hui, il n'en reste qu'un riff en live). Cette chanson-titre, donc, est une illustration parfaite de la pochette et de ses deux faces: cauchemar-agonie/réveil-agonie … une monstruosité musicale, absolument remarquable. J'arrête les oxymores ; ce titre figure parmi mon top du Sab.
Le disque semble enchaîner de manière plus cool, A National Acrobat (16/20)(rien que ce titre, venu de nulle part!! là aussi on est loin des choses convenues!!) – mais c'est une chanson presque aussi épique (et décadente) que la première ; et d'une certaine façon, par sa complexité moins heavy metal, elle donne le "la" pour le gros des chansons de cet album, qui n'est pas tant heavy que ça … On est loin du death metal.
Ce deuxième titre annonce à mon sens le titre final, Spiral Architect (17,5/20)(encore un intitulé loin de « My Heart's on Fire » ou « Baby the damage is done » etc …). Titre 1% dissonant, chant d'Ozzy oblige (dissonant, mais pas faux), 99% superbe et original. Vol. 4 n'était qu'un essai de gamins face à cette architecture harmonique … Excellent, et en plus, impossible de se lasser de cette spirale musicale! Magnifique final !
Fluff, en attendant, est un instru sympa, mais oubliable (des arpèges pour l'essentiel, et dieu sait que j'aime les arpèges, mais là, c'est juste sympa, sans plus). Par contre, c'est parfait pour faire une pause entre SBS, A National Acrobat et le prochain titre-phare (largement oublié, je le concède) de cet album : Sabbra Cadabra (17.5/20)… Encore un gros waow … Ca commence comme un titre du top 50 distordu de façon fièvreuse, une jolie mélodie agréablement riffée par Iommi (putain de riff oublié, pourtant excellent), un chant proche de la rengaine (criarde) – puis un break, toujours à mi-chemin entre le top 50 pop/bluesy et la maladie mentale. En d'autres termes, jamais on n'aura été aussi proche de l'essence de Black Sabbath au meilleur de son inspiration. Bon, la fin tire un tout petit peu en longueur, un défaut mineur.
Killing yourself to live (le titre est un brin moins original, mais efficace), ouvre la face B, de façon plus convenue au début : ça ressemble à du bon « Vol. 4 » – solo de Tony inclus (deux pistes qui se répondent, et c'est beau, je trouve), puis le titre rebondit en plusieurs breaks, ça swingue, ça rocke, ça descend, ça monte, c'est superbe – et ça s'achève de façon endiablée (et un peu moins inspirée, si je suis critique). Un titre qui aurait pu fonctionner en live (il a été joué à la fin des années Ozzy, en témoigne « Live at Last »), mais compliqué … Autrefois, dans les années 50, euh, 80, je le trouvais sublimissime, aujourd'hui, je serais plus mesuré, mais très très positif (17/20).
Suivent, sur la face B toujours, Who are you ?, et Looking for today. Who are you (13,5/20) est discutable, mais j'aime bien., malgré le riff au synthé-mumuse (cool en 73 – Jean-Michel Jarre, Oxygène, c'est la même époque, et ça s'entend, malgré une parenté somme toute assez lointaine ^^). Une bonne mélodie, un double tracking bien malsain sur la voix d'Ozzy … Pas le titre du siècle, mais bien dans l'ambiance.
Looking for today (15,5/20) est d'un autre calibre, sans être exceptionnelle non plus. Les strophes sont sympa et rappellent Master of Reality ou Vol. 4 – mais ça se complique un peu dès le bridge, et je dois avouer que le refrain, nonobstant sa simplicité claironnante, me plaît énormément (les arpèges superbement sabbathiens d'Iommi n'y sont pas pour rien). Je parle souvent de titres « un peu oubliés », celui-ci l'est tout à fait, et pour le coup c'est un tort !
Et nous revoici à Spiral Architect (cf. supra)
Bilan : à mes oreilles, c'est le meilleur album de Black Sabbath, c'est-à-dire un des meilleurs albums à mes oreilles tout court . Cela dit, ça se discute, et je suis certain que beaucoup d'auditeurs ne partageront pas cet enthousiasme : c'est un album zarbi, voire tordu, même et surtout selon des standards hard/heavy, et même, paradoxe suprême, pour les amateurs du Sab tendance « Paranoid ». C'est un peu complexe – je ne dis pas ça du tout pout « humilier » ceux qui n'aiment pas – mais pas trop complexe non plus, vu que je confesse ne pas comprendre la musique vraiment complexe …. Bref, c'est une sorte de mélange entre le Sab classique et du hard prog tendance cancer en phase terminale. Le son, et surtout la prod, sont d'excellente facture (18/20).
PS : Quiconque possède mon exemplaire vinyle des années 80 aurait-il la gentillesse de se dénoncer ?
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iangillan le 27 Août 2015, 21:03, édité 2 fois au total.
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